Evènement vélo Le Castellet (24h)

Tourner en rond pendant 24h, dit comme ça, ça ne fait pas rêver. Mais l’idée de voir la distance qu’il était possible de parcourir en 24h était dans mon esprit depuis quelques temps. La création de l’évènement vélo sur le circuit du Castellet l’an passé, plus proche que Le Mans et moins vire-vire que les 24h de l’INSA, a fini de me convaincre de prendre le départ cette année.

Je suis donc descendu sur Le Castellet vendredi soir. J’ai retrouvé là-bas Pierre (un des participants de l’épopée suédoise) et Valérie qui m’avaient réservé une place dans leur camping-car, merci à eux.

Quand j’arrive, ils sont en plein discussion avec deux autres membres du Team Cyclosportissimo, Thomas et Thierry. Comme aucun d’eux n’avait pu être à l’AG en février, c’est l’occasion de faire connaissance.
Chacun retourne manger dans son camping-car et nous ne trainons pas trop. Pas question de prendre le départ en déficit de sommeil. En ce qui me concerne, ce sera sans doute le cas malgré tout, depuis une dizaine de jour, je dors mal. De quoi revoir mes objectifs à la baisse. Je sais d’après mes temps sur des BRM 400 que les 500km sont un minimum. Ici, pas de contrôles, on s’arrête quand on veut, un tour ne fait que 3,8km, on ne transporte que le strict minimum sur soi, la piste est bonne.

Toutes les conditions sont réunies pour maximiser la performance. Dans un coin de ma tête, j’ai le chiffre de 600km, mais je le pense difficile à atteindre… Le matin, il n’y a plus qu’à préparer ses affaires. Les autres membres du team arrivent les uns après les autres Laurent Road Rocker, accompagné d’Eric Leblacher qui sera dans le même box que nous, Jérôme, Jacques, Sergio, Michel, Greg et Laurent du CT Lyon, Jean-Luc. Hervé est dans un autre box, avec son club de Sanary.

Chacun de prépare tranquillement. L’épreuve de vélo elliptique est maintenant finie, la piste est ouverte, on peut aller faire quelques tours de reconnaissance. Le revêtement est très bon, mais comme dans mon souvenir, il n’y a quasiment pas un mètre de plat sur un tour. La ligne droite des stands est en descente, un coup de frein pour le virage à droite, ensuite on remonte vers la double chicane qui comporte une petite descente, puis c’est la ligne droite du Mistral. Au bout, la courbe de Signes annonce la descente dans le double virage à droite du Beausset, qui se referme, en sortie on remonte pour redescendre durant l’enchainement de courbes Bendor (gauche), Village (droite) et Tour (gauche). Un coup de frein (le deuxième sur un tour) pour le virage du Pont (droite) et nous voilà à nouveau dans la ligne droite des stands.

Maintenant, il n’y a plus qu’à attendre le départ. Pour patienter, il y a le briefing (obligatoire) et aussi aller saluer les copains, Jean-Paul, lui aussi membre du team mais privé de vélo ce week-end, présent avec ses collègues sur le stand Rosti ainsi que Mickael, photographe attitré du team, avec ses copains de GFNY Ventoux.

La mise en place sur la grille de départ est enclenchée à partir de 14h, pour un départ à 15h, c’est large. Nous restons longuement à patienter sur la grille, heureusement, des bouteilles d’eau sont à notre disposition pour que nous ne nous déshydrations pas en attendant le départ. Comme je suis équipé d’un prolongateur, je me retrouve classé dans les vélos spéciaux et relégué en fond de grille.

Du team, il y a Thierry qui est avec moi, les autres sont devant. L’organisation est un peu tatillonne sur le respect très strict de l’ordre des vélos qui doit être le même que celui des dossards, pas question que le 124 soit devant le 123…

15h, le départ est donné. On traverse la piste en courant (ou pas) pour enfourcher nos montures et nous voilà partis ! Je n’ai pas réussi à prendre les roues ni de Thierry, ni d’Eric Leblacher mais je m’y attendais. J’espère donc prendre un bon groupe pour profiter de l’abri.

Il y a un pas mal de monde, ce serait malheureux que ceux qui sont en relais à 6 ou 8 laissent rouler ceux qui sont en solo. Malheureusement, ça ne se passe pas vraiment comme prévu, je ne trouve pas vraiment de groupe. Je me retrouve soit seul, soit à 3 ou 4, et pas forcément avec du monde pour me relayer. Pourtant, je ne chôme pas, le compteur affiche plus de 36km/h de moyenne.

Le premier groupe me passe, j’essaye de prendre les roues, mais ça va vraiment trop vite (ils tournent à 42km/h), même en restant abrité.

Frustrant de devoir rester encore seul, seules satisfactions pour le moment les jambes qui sont mieux que ce que je pensais et mon prolongateur dont je me sers abondamment. Autant sur route, j’avais jusque-là un avis mitigé, mais là, sur circuit, c’est un vrai régal. Je me fais juste une frayeur dans le virage du Pont, une sensation de flottement de la roue arrière. Pourtant, je n’ai pas l’impression d’être passé plus vite que les autres tours, ai-je pris une rainure ou un peu trop d’angle ? Je surveille la déformation de mon pneu arrière pour m’assurer que ce n’est pas une crevaison lente, la pression semble correcte à vue d’œil… Le deuxième groupe me rejoint, celui-là tourne seulement 2km/h plusvite que moi, je peux prendre les roues. Je retrouve Laurent, Jacques et Jean-Luc.

J’espère seulement ne pas avoir laissé trop de cartouches à tourner en solo. Nous n’allons pas rester trop longtemps avec eux et rapidement former un troisième groupe qui se contentera de 35km/h. Quand nous levons le pied, cela se voit, les avions qui auparavant nous prenaient un tour toutes les 45minutes reviennent plus vite, eux n’ont pas ralenti… Jean-Luc et Jacques ont pris les roues de l’avant-garde du groupe quand celui-ci s’est scindé en deux. Jacques nous fera plusieurs fois le coup du « Je me relève » pour finalement sauter dans les roues du prochain groupe à nous dépasser.

Je suis attentif à bien boire et manger régulièrement, une gorgée ou deux tous les 2 tours au maximum et une barre ou un gel toutes les heures. Pourtant, je décide d’anticiper ma pause, 19 au lieu de 20h, Laurent a la même idée. Nous nous arrêtons donc ensemble pour une bonne pause. Après 135km en 4h, nous l’avons bien mérité. On prend notre temps pour manger, boire, refaire les bidons.

On en profite également pour monter nos éclairages afin de ne pas avoir à nous ré-arrêter quand la nuit sera là. En gros la pause dure 30 minutes, et nous repartons.

Au fil de tours nous observons que le vent tourne. Cela semble pour l’instant nous éviter les nuages que nous avons vu apparaitre puis se rapprocher du circuit. La nuit est maintenant tombée, nous avons mis nos éclairages. Après être parti avec les avions, Jérôme roule maintenant avec nous. Quelques gouttes font leur apparition. J’hésite à m’arrêter, je n’ai pas pensé à prendre mon Gore-Tex. Mes deux compagnons de route m’incitent à ne pas m’arrêter, il ne tombe que quelques gouttes pour l’instant. Je les écoute, et j’ai bien raison. Je leur dirai plus tard en rigolant qu’en tant que Flamand et Ch’ti, forcément ils ont le flair pour la pluie.

La nuit est maintenant bien présente. Les groupes d’avions continuent à nous dépasser, nous roulons à notre allure, nous doublons nous aussi du monde, pas seulement des concurrents en solos d’ailleurs. Quelques-uns profitent de notre allure, c’est le jeu.

Sergio nous dépasse dans le double-droite du Beausset et nous dit de passer le virage en continuant à pédaler. On essaye le tour suivant, et ça marche. On sort du virage en survitesse par rapport à ceux qui sont resté en roue libre, parfait pour la petite remontée qui suit. D’autant qu’avec le vent qui tourne, on l’a parfois de face sur ce tronçon. On reconnait aussi Hervé, généreux dans l’effort, toujours à l’avant de son groupe à relancer, tout comme Greg.

A un moment, je pense devoir anticiper mon arrêt faute de boisson dans les bidons, mais finalement, je vais réussir à tenir pour un relais de 4h. Je m’essaye au basket pour me débarrasser de mes emballages vide dans une poubelle disposée dans la ligne droite du Mistral. Je tourne à 50% de réussite.

La pause suivante aux alentours de 23h, soit 4h après la précédente comme prévu. Cette fois, je pense à prendre mon Gore-Tex dans une poche en cas de pluie. On se ravitaille, on refait les bidons, on prend notre temps. On discute avec les copains qui passent au stand en même temps que nous.

Nous reprenons notre route. Nous allons à nouveau retrouver Jérôme, c’est sa première nocturne sur un vélo, et il aime ça. J’ai monté mon éclairage avant et mon GPS est donc dans la poche. J’aurais pu me dispenser de l’éclairage avant, ou en mettre un minimaliste. Bien qu’il ait été annoncé obligatoire, nombreux sont ceux qui tournent sans. Il est vrai qu’il n’est pas nécessaire la piste étant parfaitement lisse, mis à part une rainure juste avant la chicane qui précède la ligne droite du Mistral. C’est d’ailleurs curieux, car sur les premiers tours, je ne l’avais pas remarqué, ce n’est qu’au fil des tours et avec l’apparition de la nuit que je l’ai notée.

Jérôme a filé et nous voilà 4 à rouler ensemble. Un des gars est en solo aussi et nous a dit qu’il était limite et ne pourrais pas nous relayer. J’essaye de voir le dossard du quatrième, quand j’y arrive enfin, je m’aperçois qu’il est en relais à 4. Je manœuvre donc pour le laisser passer devant, il a beaucoup été dans nos roues jusque-là.

Laurent décide de passer à ce moment-là mais a la réflexe de regarder le dossard, il a un peu de mal à le lire car il est mal accroché et de travers. Quand il voit que ça commence par un 4, il me fait signe de le laisser devant et va sagement se remettre dans sa roue. Nous roulons aussi un quelques tours avec un gars en relais à 8 qui nous dit que nous sommes de grands malades à le faire en solo.

Curieux, ce n’est pas la première fois que j’entends cela… On jette un œil aux stands en passant. Tous sont allumés sauf le nôtre… Il faut dire qu’à part deux relais à 2, dont un fixie, nous ne sommes que des solos dans notre box. Curieux de voir cette zone sombre dans la ligne lumineuse des stands. Je ne serai pas le seul à remarquer cela, non sans sourire.

La pause suivante est un peu anticipée, mais sera plus courte que les autres. Le temps d’apprendre l’abandon de Sergio qui avait l’impression d’être un hamster dans une roue et a préféré lâcher l’affaire. C’était une première pour lui, il préfère les grands espaces. Nous repartons dans la nuit. Le vent tournait parfois d’un tour sur l’autre, mais là, il semble se calmer. Nous aussi, nous nous calmons, l’allure est peu tombée. Laurent commence à avoir une douleur derrière un genou. Sans douleur, je ne suis pas en état de rouler plus vite que lui, ça me va bien de lever le pied.

Ce que je redoutais fini par arriver, avec le vent qui est tombé, c’est la pluie qui arrive. On s’en serait bien passé, les quelques gouttes que l’on ramassait de temps en temps nous suffisaient bien. Il ne fallait pas rêver, c’était annoncé, ça devait bien finir par arriver. J’ai viré les verres de mes lunettes pour ne garder que les verres correcteurs, à cause de la buée, à la pause précédente, j’ai été bien inspiré.

Nous décidons de tourner jusqu’à l’heure prévue, 5h et de faire une pause en attendant que ça se calme. Je décide de faire une petite sieste après avoir mangé un morceau. Les bidons sont remplis, les poches garnies, dès qu’il le faut, je suis prêt à repartir. Je somnole un peu et quand j’émerge, il pleut toujours. Laurent s’est assoupi aussi.

Michel est rentré peu après nous et décide de plier bagage. Jean-Luc et Pierre sont également à l’arrêt dans l’attente d’une accalmie. Elle va être longue à venir cette accalmie, nous nous arrêterons un peu plus de deux heures avant d’enfin repartir.

Avec la pluie qui a trempé la piste, je me suis équipé plus chaudement : jambières, manchettes et toujours le Gore-Tex. La température n’est pas tombée tant que ça, et rapidement, je me retrouve à avoir trop chaud. On discute un peu avec Laurent,et nous décidons de faire une pause éclair pour retirer le superflu. Tout de suite, ça va mieux.

Il est bientôt 9h, le départ de l’épreuve de 6h va être donné, nous voyons les participants se positionner pour le départ. Les plus véloces vont nous passer comme un courant d’air. Parmi eux, un certain nombre sont sur des vélos de contre-la-montre. Il y a même une roue lenticulaire sur l’un des vélos.

Quelques tours plus tard, nous voyons arriver le brouillard. Sauf qu’à peine l’entrée des stands franchie, c’est une grosse pluie d’orage qui s’abat sur nous. Le temps d’arriver au bout de la ligne droite pour mettre le Gore-Tex, que j’avais eu la bonne idée de garder dans la poche du maillot, nous sommes déjà trempés. De toutes manières, nous n’avons pas le choix, il faut boucler le tour pour pouvoir rentrer au stand.

Dans un courbe, j’aperçois Mickael, le photographe, sous un parapluie, je passe près de lui en lui demandant s’il ne veut pas me prêter son parapluie.

Laurent fait le pari d’une accalmie rapide et reste en piste. Il rentrera un ou deux tours plus tard pour nous rejoindre. Jean-luc est déjà à l’abri quand j’arrive, tout comme Valérie qui a à peine eu le temps de boucler deux ou trois tours. Vont suivre Pierre puis Laurent, victime d’une glissade sans gravité en rentrant en vélo dans le stand.

Le reste du team passera au stand, mais juste pour des pause courtes (plus ou moins) : Laurent M, Greg, Jacques, Thierry, Thomas. Eric Leblacher fait aussi un passage éclair. Pas le temps d’attendre que ça se calme, au mieux ils enfileront des vêtements secs et repartiront illico.

Nous, nous allons attendre au sec et au chaud que ça se calme. Une accalmie nous donnera de faux espoir. On jette un œil sur l’écran qui filme l’entrée des stands, on distingue à peine le portique de chronométrage. Enfin, ça se calme, le soleil n’est pas encore là, mais le ciel est moins noir. La pluie faiblit puis s’arrête. Il va falloir se préparer à repartir. Il nous reste environ 4h à rouler. Vu mon kilométrage, la barre des 500km est jouable, voilà donc l’objectif avec lequel je repars.

Laurent a été un peu plus prompt que moi à se préparer et est parti un tour devant moi. Je vais le rejoindre et nous allons à nouveau rouler ensemble. Pierre reparti à peu près en même temps que nous va faire quelques tours avec nous. Les copains qui ne sont pas arrêtés semblent à la dérive, nous allons les reprendre et les dépasser les uns après les autres sans qu’ils ne puissent nous suivre. Tout l’inverse de la situation normale. Seul Thierry prendra nos roues.

Pendant 2 tours, je vais faire le train, jusqu’à ce qu’à ce que dans la ligne droite du Mistral il me dise d’y aller et me fasse signe de continuer alors qu’il était 20m derrière moi au niveau de Signe. Dans l’affaire, à ne pas regarder derrière moi (avec les jantes très hautes – 80mm – de Thierry, au bruit je savais s’il était dans ma roue), j’ai aussi perdu Laurent.
Je continue seul jusqu’à prendre des petits groupes. La petite sieste de ce matin conjuguée au fait de ne pas avoir roulé sous la pluie m’a procuré une réserve de force que beaucoup n’ont plus. J’arrive à prendre groupes qui sont en relais ou même des gars qui sont sur l’épreuve de 6h. L’occasion de discuter avec un gars qui roule avec un plateau Osymetric, plateau que j’ai longuement hésité à monter sur ma monture longue distance… Je rejoins finalement Laurent et nous allons à nouveau rouler ensemble.

Nous continuons à reprendre des groupes et nous allons remonter jusqu’à un groupe avec tous les copains du team et rester avec eux. Sans réelle concertation, nous avons décidé de finir tous ensembles. Ceux qui ne sont pas encore parmi nous seront repris avant l’arrivée. Eric Leblacher est là aussi, il me dit que c’est sympa de faire un final tous ensemble après « s’être fait la guerre » pendant 24h. C’est un gros peloton qui se présente dans le dernier tour. Dans les derniers virages, on fait passer Eric devant, à tout seigneur, tout honneur.

Nous franchissons la ligne tous ensembles. On se congratule, on pose pour la photo. Nous avons des petits yeux, mais des grands sourires. L’évènement 2016 est fini, on va maintenant pouvoir s’inscrire pour 2017.

Sur un plan personnel, je redoutais de tourner en rond pendant 24 sur un circuit de moins de 4km. En fait, j’ai trouvé ça assez grisant. L’objectif (minimum) de 500km a été atteint facilement. Sans la pluie, les 600km (objectif haut que je pensais très ambitieux) étaient jouables, c’est donc avec cet objectif que je reviendrais en 2017…