Paris-Brest-Paris 2011
Contrôle des vélos
Samedi, la matinée est consacrée aux ultimes préparatifs avant de partir pour Saint-Quentin en Yvelines. Nous passons au Décathlon d’à côté car Bruno cherche un maillot technique et j’ai oublié ma couverture de survie à Lyon.
On part sur Saint-Quentin en Yvelines à 12h pour être à l’heure pour le contrôle des vélos prévu à 15h. Une petite erreur de parcours nous fera visiter Palaiseau et arriver un peu plus tard que prévu, mais nous sommes toujours dans les délais.
Le contrôle des vélos se passe très bien. Nos vélos sont déclarés conformes. On va ensuite récupérer nos dossiers et nos maillots.
C’est à ce moment-là que l’on croise Christophe, Valexnico, Benny accompagnés de Bruno91 du forum de l’Ardéchoise. Pendant que l’on discute, Olivier Buisson et le collègue qui l’accompagne viennent saluer Christophe et nous saluer.
Avant de partir, je passe au stand du forum des Rubans Blancs. Yvan, l’administrateur du forum est en pleine discussion, je n’aurais pas l’occasion de faire sa connaissance à ce moment-là.
Alain s’étant aperçu qu’il avait oublié sa lampe frontale à Lyon, au retour, nous faisons un crochet par le centre commercial de Palaiseau. Le magasin Intersport que nous avions repéré n’ouvre que dans 4 jours. On cherche aux alentours, mais on ne trouve rien. Nous repartons bredouille sur Auxerre. Heureusement, nous arrivons avant la fermeture du Décathlon, où Alain trouvera une lampe frontale et Bruno échangera son maillot technique qu’il avait pris un peu petit.
Maintenant, nous sommes prêt à partir, plus qu’une nuit de sommeil, que l’on espère serein, et ce sera le jour J.
Avant le départ
Nous avons choisi de partir d’Auxerre dans la matinée et de manger sur place, à Saint-Quentin en Yvelines. Cette fois-ci pas d’erreur de parcours. On tourne un peu avant de trouver le parking et un restaurant ouvert. Il y en a un juste à côté du parking, il est bondé d’une foule cosmopolite : japonais, italiens, slovènes, anglais, états-uniens,… On évacue le stress qui commence à se faire sentir en plaisantant, un français installé à la table d’à côté rigole en nous entendant raconter nos bêtises.
Le plat de pâtes avalé, nous retournons au parking nous préparer. Nous sommes largement dans les temps, et nous savons que nous risquons d’attendre longtemps au soleil, mais il nous faudra passer par là pour faire partie des premières vagues de départ.
En sortant du parking, impossible de clipser ma pédale droite. J’essaye plusieurs fois, en vain. Je m’arrête pour regarder plus précisément ce qui empêche la chaussure d’accrocher la pédale. La cale de ma chaussure est parfaitement en place, il n’y a pas de caillou coincé qui pourrait expliquer mon problème. Je regarde donc ma pédale, c’est bien de là que vient le problème. La patte métallique qui assure le maintien de la partie arrière de la cale est cassée.
Maintenant que le diagnostic est posé, il faut que je trouve un vélociste. Nous nous rendons sur la ligne de départ où nous retrouvons Christophe, Bruno91, Valexnico, ainsi que Michel. Bruno et Alain restent avec eux pendant que je vais chercher un vélociste. Les organisateurs m’indiquent que celui qui était présent hier à la sortie du contrôle des vélos est toujours là. Je m’y rends donc rapidement.
Le vélociste me voyant un peu stressé me rassure en me disant qu’il vaut mieux que cet incident m’arrive maintenant. Il me change mes pédales en quelques minutes et comme je le questionne sur le sujet, il m’indique que la position sera parfaitement identique à celle que j’avais avec mes pédales précédentes. Donc, pas de risques de tendinites liés à un changement de position. Il me demande ce que je compte faire de mes anciennes pédales. Comme je n’ai pas l’intention de les promener sur 1200 km ni de m’en faire un talisman pour éloigner le mauvais sort, je les lui laisse.
Je file donc rejoindre le groupe en profitant de mon passage près d’un point d’eau pour remplir mes bidons.
Les copains ont prévu le coup de l’attente interminable au soleil et sont allés acheter un lot de bouteilles d’eau. Cela leur a permis de remplir les bidons et de disposer d’une réserve d’eau pour les heures qui nous séparent du départ.
Le temps passe, on observe les maillots, nouvel échantillon de nationalités présentes : Irlande, Hongrie, Allemagne, Danemark, Suède… Enfin, la première vague de départ est annoncée. Ce sont les véloces qui sont inscrits en moins de 80h, les meilleurs sont mêmes sous les 45h.
Ensuite, viennent les vélos spéciaux (tandem, vélos couchés…). Leur départ est un peu retardé à cause d’un véhicule qui gêne la circulation. Les organisateurs attendent que celui-ci soit dégagé pour donner le départ.
Enfin, c’est à nous de bouger et de prendre place sur le stade pour le grand départ. Notre petit groupe se trouve séparé et nous craignons de ne pas nous retrouver dans la même vague de départ. La première vague partira sans nous, cela c’est joué à 20 places près, mais du coup, nous sommes assurés de partir ensemble. Pour la suite, rouler ensemble, cela se décidera en fonction de nos états de forme respectifs. Dans nos esprits, nous sommes dans l’optique de rouler seuls, si tant est que l’on soit seul à un moment sur la route de Paris-Brest-Paris.
Dans la file d’attente, on discute pour passer le temps et on retrouve des Rhône-alpins avec qui nous sympathisons.
Nous avons toujours nos bouteilles d’eau qui nous ont permis d’éviter de nous déshydrater sous le soleil. Il nous faut nous en débarrasser, gentiment, une dame du public nous entendant parler de ça se propose de ramasser nos bouteilles vides, merci à elle.
La première vague est partie, c’est à notre tour d’avancer. Christophe se retrouve en première ligne, à côté d’Yvan. Nous savons que nous ne resterons pas très longtemps dans les premières positions de notre groupe, mais pour le départ, c’est toujours plus rassurant d’être devant qu’au milieu du peloton de 400 cyclos.
Alors que nous attendons le départ je m’aperçois que mon compteur panique. Il affiche des vitesses incohérentes, il a du capter le signal d’un compteur ou cardio-fréquencemètre voisin. Pendant les quelques minutes que cela a duré, si je me fie à ses indications, j’ai parcouru 70 km à la vitesse moyenne de 170 km/h, le tout avec une pointe à plus de 230km/h. Cela m’amuse, mais je m’arrête de rire quand je m’aperçois que je ne peux pas le remettre à zéro. Dès que j’essaye de le faire, au lieu de se réinitialiser, j’entre dans les réglages. Après plusieurs tentatives infructueuses, j’ai du modifier les réglages et je ne suis donc plus très sur des indications qu’il va me fournir pendant les 1200 prochains km. Je décide de me contenter de l’affichage de l’heure. Mais si je devais fournir un avis sur ce compteur, il serait très négatif et tranché : c’est de la m… !
Saint-Quentin en Yvelines – Mortagne-au-Perche
Enfin, c’est à nous de partir. Après les dernières recommandations des organisateurs, voici le coup de feu qui donne le départ. On a beau y avoir pensé depuis un an, avoir déjà fait Paris-Brest-Paris, le départ est toujours un instant particulièrement émouvant.
Comme à chaque fois, le départ est assez rapide, le temps que les plus véloces se placent devant, et avec la longue attente, les montures piaffaient d’impatience (à moins que ce ne soit les cavaliers).
Le départ a lieu 2 heures plus tôt qu’il y a quatre ans, et nous avons pris la 2ème vague de départ, contre la 5ème en 2007. Cela fait que nous allons rouler de jour pendant quelques heures et ainsi profiter des villages que nous traversons. Il y a notamment quelques belles maisons à colombage.
Je discute un peu avec Yvan, puis Christophe, Bruno91, Bruno, Valexnico et moi nous regroupons assez naturellement. Alain file devant, nous nous doutons que nous ne le reverrons certainement pas d’ici notre retour. Michel est également parti devant à son rythme.
Il fait toujours chaud et parmi les spectateurs qui sont au bord de la route, nombreux sont ceux qui proposent de l’eau. Nous en profiterons d’ailleurs au bout d’une soixantaine de kilomètre pour remplir nos bidons qui se sont bien vidés depuis notre départ.
On retrouve Benoit, un des Rhône-alpins avec qui nous avions discuté dans le sas d’attente. Il nous indique qu’il veut rouler avec nous, son compagnon de route étant parti dans une autre vague. Finalement, il part devant car son allure est légèrement plus rapide que la notre.
Dans les groupes nous retrouvons Pascal, un copain que Christophe a rencontré sur Londres-Edimbourg-Londres. La nuit commence maintenant à tomber les organisateurs se sont postés sur le bord de la route en rase campagne et nous demandent de nous arrêter pour mettre nos éclairages en marche. L’éclairage n’est pas encore indispensable, mais il vaut mieux être prudent. Dans un premier temps, ce sont surtout les gilets réfléchissants qui nous permettent d’être vus.
Pascal trouve que Christophe a mangé du lion (du Lyon?) en le voyant doubler les groupes que nous rejoignons. En fait, l’explication est simple, il préfère être devant pour éviter les risques de chute et rouler à sa main.
Le Perche se profile maintenant. Je me rappelle très bien des forts pourcentages de la bosse de Longny-au-Perche. Elle est par contre beaucoup plus courte que dans ma mémoire. Sur ce profil plus accidenté je roule à mon rythme sans me préoccuper des autres. Bruno roule à peu près à la même allure que moi.
A l’entrée de Mortagne, je rejoins un cyclo de Misérieux avec qui j’avais discuté sur les brevets de Bourg-en-Bresse. Bruno91 arrive en même temps que moi, je lui demande où sont Christophe et Valexnico, ils sont juste derrière lui.
Nous posons les vélos et Christophe propose un temps de pause de 30 minutes. En allant chercher à boire, je croise Michel qui s’apprête à repartir. Il s’est arrêté 45 minutes et a croisé Alain qui repartait quand il arrivait.
Il a fait très chaud depuis le départ, et je sens bien que mon organisme n’a pas trop apprécié. Il faudrait que je mange, mais je n’ai pas faim. Je préfère me contenter de boire de l’eau gazeuse pour me réhydrater. Nous avons également remplis nos bidons dès notre arrivée. L’expérience d’il y a quatre ans nous sert et nous faisons en sorte de ne pas perdre de temps bêtement.
Le groupe va « perdre » Bruno91 qui est devant un plat de pâtes quand nous repartons. Nous croisons Jean-Luc de Chassieu qui arrive. Il a pris des roues et a repris pas loin d’une heure sur nous depuis le départ.
Mortagne-au-Perche – Villaines-la-Juhel
Pas grand-chose à signaler sur cette étape parcourue intégralement de nuit, si ce n’est le public au bord de la route. Nous avons eu du monde au départ et dans les villages jusque Mortagne-au-Perche. L’heure avançant, le public diminue, mais il reste toujours du monde. A 4h du matin, alors que nous hésitons à une intersection, quelqu’un nous indique la route à suivre depuis sa fenêtre.
Autre chose qui me surprend, c’est l’absence des motards. Il y a 4 ans, nous avions vu de nombreuses motos en charge de vérifier le respect du règlement par les participants et principalement l’éclairage. Cette année, je n’ai pas le souvenir d’avoir vu une seule moto, ni aucun véhicule en charge de ces vérifications.
Les kilomètres défilent et je n’arrive toujours pas à m’alimenter. Il faut pourtant que je mange, mais je suis encore sous l’effet du coup de chaud et cela m’inquiète un peu. Heureusement, je peux boire, ce que je fais régulièrement en alternant boisson énergétique et eau. Avec le temps, je vais pouvoir absorber un gel énergétique dans la seconde partie de l’étape.
Nous approchons maintenant de Villaines-la-Juhel et malgré l’obscurité encore présente je reconnais certains lieux.
Nous roulons tous les 4, Christophe, Valexnico, Bruno et moi, discutant avec les cyclos que nous rejoignons / qui nous rejoignent.
Sur ce tronçon, il y a une borne qui indique le kilométrage nous séparant de Brest. Nous étions passés en plein jour il y a 4 ans, et je pensais que celle-ci serait invisible dans l’obscurité, mais il y a un éclairage qui la met en évidence. Je ne me rappelle plus du chiffre exact, mais le kilométrage est supérieur à 400. Pas de quoi nous affoler, il faut avancer doucement mais sûrement.
Je me rappelais également de l’interminable bosse qui est juste avant Villaines-la-Juhel, mais il semble que nous la passions avec plus de facilités qu’en 2007.
Nous arrivons maintenant à Villaines-la-Juhel. Nous parquons nos vélos et remplissons nos bidons avant d’aller manger. Alors que nous discutons de l’accueil réservé aux cyclos il y a 4 ans, et du portage des plateaux jusqu’à la table, voilà que l’on nous propose à nouveau de nous les porter jusqu’à notre table. Ce que nous acceptons.
Nous mangeons pendant l’heure de pause que nous nous sommes accordé. Christophe va discuter avec Yvan qui est à une autre table. J’aperçois également Jean-Philippe quand il quitte la salle de restauration. Bruno a également aperçu Jeannot, du Perréon. Je retrouve également notre voisin de table de ce midi que je salue.
L’heure s’écoule vite et il nous faut déjà rejoindre nos montures. Au moment où nous nous apprêtons à repartir, Benoit, un cyclo que nous avions rencontré sur la ligne de départ, s’apprête à faire de même et nous demande s’il peut se joindre à nous. Ce que nous acceptons volontiers.
Villaines-la-Juhel – Fougères
C’est encore la nuit quand nous partons de Villaines-la-Juhel. Les heures qui arrivent sont parfois les plus difficiles. On a déjà roulé toute la nuit et malgré le café, le coup de barre au petit matin est toujours possible.
C’est d’ailleurs ce qui va arriver à quasiment tout le groupe en l’espace de 15 minutes. Ca commence par Benoit qui fait un écart et nous aurait expédié au tapis si je n’avais pas été vigilant. Il commençait à s’endormir. Fort de mon expérience d’il y a 4 ans, quand j’avais eu moi aussi envie de dormir en revenant sur Loudéac, je le fais parler, lui demande de raconter ses brevets pour l’occuper et ainsi faire passer l’envie de dormir.
Quelques minutes après, c’est Bruno qui s’arrête quelques instants car il a sommeil également. L’allure de Christophe perd quelques kilomètres/heures, signe chez lui d’une envie de dormir. Valexnico reste avec lui et confiera plus tard avoir eu lui aussi un coup de barre à ce moment-là.
Benoit et moi avons pris un peu de champ devant. Nous nous sommes fait doubler par Jeannot, du Perréon qui bien que n’arrivant pas à s’alimenter roule à bonne allure quand même.
On s’arrête pour attendre et le groupe se reforme, à l’exception de Bruno qui ne nous rejoindra que quand nous arriverons au contrôle.
Le parcours est composé de grandes lignes droites et d’un profil accidenté jusqu’à l’arrivée à Fougères. Cela pourrait être usant, mais l’ambiance et le moral sont bons, et c’est sans problèmes particuliers que nous arrivons à Fougères.
Les organisateurs ont décidé de nous faire visiter la ville avant de rejoindre le contrôle car nous avons l’impression de tourner dans la ville. Christophe nous confirme cette impression en voyant son GPS.
Fougères – Tinténiac
Notre organisation sur les contrôles est bien meilleure qu’il y a quatre ans, la soufflante que Jean-Jacques nous avait passés ici à l’époque a porté ses fruits. On évite les allers/retours aux vélos parce que l’on a oublié un bidon ou autre chose. Au final, cela nous permet presque de prendre notre temps pendant l’heure que durent nos arrêts. C’est d’ailleurs curieux comme la perception du temps change. A Villaines-la-Juhel, j’avais l’impression que l’arrêt avait été de 45 minutes seulement, alors que maintenant, l’heure d’arrêt est presque large et laisse du temps libre.
Le départ de Fougères se fait en côte, pas évident de repartir comme ça après la pause, on commence à faire chauffer le triple plateau.
La partie accidentée du parcours n’est pas très longue et la seconde partie est très majoritairement constituée de faux-plats descendants.
Christophe qui est en pleine forme assure des relais très appuyés. Cela nous permet de rejoindre plusieurs petits groupes qui restent dans nos roues. Au final nous sommes une bonne vingtaine et personne pour relayer. Il y a bien un brésilien qui passe de temps à autres, mais comme il accélère de 2km/h à chaque fois, cela ne sert pas à grand-chose, mais on ne va pas lui reprocher de vouloir passer. On en discutera avec lui à l’arrivée pour que ses prochains relais soient plus efficaces, ce sont d’autres groupes qui en profiteront car nous ne roulerons plus avec lui d’ici l’arrivée.
Pendant un bref instant, nous avons pu croire avoir trouvé du renfort quand un italien s’est porté devant. Cela a duré le temps qu’un de ses collègues le rejoigne, qu’ils discutent et s’effacent définitivement jusqu’à notre arrivée à Tinténiac.
L’étape est la plus courte de Paris-Brest-Paris, mais c’est néanmoins agaçant d’avoir une bande de suceurs de roues sur le porte-bagage.
Pendant cette étape, Benoit qui trouve que l’allure est un peu trop rapide depuis le départ par rapport à ses prévisions préfère jouer la prudence et nous laisse filer devant. On le retrouve à Tinténiac où il arrive quelques instants après nous.
Nous filons nous restaurer. Jean-Louis et Bernard, dont le tandem est arrivé peu après nous, nous rejoignent et mangent avec nous.
Tinténiac – Loudéac
Le soleil est au rendez-vous sur cette étape qui nous avait fait beaucoup de mal il y a quatre ans, notamment avec l’arrivée sur Loudéac qui nous avait parue interminable, en plus d’être humide. Cette fois, cela devrait mieux se passer, le soleil étant au rendez-vous. Le fait de passer de jour nous évitera également de voir la ville de trop loin et d’avoir l’impression de ne pas nous approcher.
En nous retournant pour nous assurer que le groupe est au complet, on s’aperçoit que nous sommes à nouveau victimes des sangsues. Une quinzaine de cyclos bien à l’abri dans nos roues et s’abstenant de toute incursion en première ligne.
Cela nous a un peu agacé sur l’étape précédente, et nous n’avons pas envie de jouer indéfiniment les bonnes poires qui prennent le vent pour les autres. Nous décidons donc de faire une pause pour satisfaire un besoin naturel, mais c’est juste un prétexte.
Le soleil est bien présent et la chaleur aussi. Nous profitons des toilettes publiques d’un village pour refaire nos bidons et je retire le maillot technique que je gardais sous mon maillot cyclo. A la réflexion, c’est ce que j’aurais du faire hier soir, mais je craignais d’avoir froid durant la nuit.
Nous roulons quelques kilomètres avec des cyclos de Saint-Martin en Haut. Eux sont partis avec une assistance, un camping-car qui les attend à chaque contrôle. Ils n’ont qu’à pointer et filent manger avec leur assistance. Vu l’affluence qu’il y a aux contrôles, on ne peut pas dire que nous y ayons perdu du temps.
Sous le soleil, nous arrivons à Loudéac, preuve que l’obscurité et la pluie ne règnent pas en permanence sur la ville comme je le croyais il y a quatre ans.
L’heure de pause est consacrée au ravitaillement, passage aux toilettes et remplissage des bidons. A cela, il faut rajouter la lectures des messages d’encouragements (en moyenne 5 à 6 par contrôles, ça fait chaud au cœur, on ne le dira jamais assez) et les éventuels coup de fil pour donner des nouvelles. Jean-Jacques nous appelle pendant notre pause. Il suit assidument notre progression et veut savoir à quoi ressemble Loudéac de jour. Pour qu’il reste sur l’impression humide d’il y a quatre ans, la météo fait tomber quelques gouttes pendant que je suis avec lui au téléphone.
Loudéac – Carhaix
Ce tronçon est un mauvais souvenir pour moi, j’y avais souffert sur la première partie très vallonnée. Il avait fallu un providentiel croissant dans un village pour me redonner des forces.
Cette année, ça se présente mieux. Je ne pars pas le ventre vide, il ne pleut pas et il fait jour. Le tronçon n’en est pas moins vallonné. Des bosses pas nécessairement très longues mais avec des pourcentages assez forts. Notre groupe avance doucement et passe les difficultés les unes après les autres.
Nous avions noté que les organisateurs avaient rajoutés un ravitaillement supplémentaire sur ce tronçon pour soulager les hébergements de Loudéac et Carhaix. Ils en ont également profité pour rajouter une nouvelle bosse dans la traversée du village.
Après Saint-Nicolas-du-Pélem, nous marquons une pause pour enfiler nos vestes réfléchissantes car le jour commence à décliner. Nous en profitons pour discuter de la stratégie à adopter pour la suite. Vu l’heure, nous décidons de nous arrêter dormir à Carhaix. Brest était certainement atteignable mais nous avons choisi de jouer la prudence, car voilà déjà plus de 24h que nous sommes partis.
Alors que nous filons vers Carhaix, on croise les premiers, deux groupes d’une trentaine d’éléments séparés de quelques minutes. On les encourage, même si l’optique dans laquelle ils font Paris-Brest-Paris n’est pas la notre, la performance physique qu’ils accomplissent n’en mérite pas moins le respect. Derrière ces deux groupes, les cyclos roulent 1 par 1, peu d’entre eux répondent à nos salutations et encouragements. Parmi eux, je reconnais Jean-Pierre Cellier, mais je le reconnais trop tard pour l’encourager personnellement.
On arrive sur Carhaix largement en avance sur le plan de route que nous avions en tête. Christophe propose de profiter de cette avance pour dormir un peu plus que prévu. Tout le monde acquiesce. Et nous convenons de nous réveiller pour partir à 3h15.
J’en profite pour appeler Roland & Céline, mes amis de Brest pour leur donner une estimation de mon heure d’arrivée au contrôle Brest demain matin et préciser le lieu car nous avons prévu de nous voir.
Le dortoir est quasiment vide quand nous allons dormir après avoir pris une bonne douche. Nous savons que demain matin quand nous nous lèverons, le dortoir sera bondé. Mais ce sera demain matin, 4h de sommeil se seront écoulées d’ici là et nous aurons repris des forces pour continuer notre périple.
Carhaix – Brest
La nuit a été courte, mais profitable. J’entends que ça s’anime autour de moi et l’on vient me réveiller. Il me faut quelques instants pour retrouver mes esprits et me rappeler où j’ai rangé mes affaires. Je saute dans mon cuissard, regroupe mes affaire et file prendre le petit-déjeuner.
Nous repartons à l’heure prévue pour cette dernière étape aller du parcours. Pas de soleil pour le moment, il fait encore nuit et nous sommes plutôt dans la brouillard. J’avertis Christophe dont l’un des éclairages arrière commence à décliner, rien de dramatique pour le moment, mais il vaut mieux être prudent. J’avertis également un autre cyclo dont l’éclairage arrière et lui totalement défaillant, mais cela ne l’inquiète pas, il m’annonce qu’il attendra Brest pour changer ses piles.
Vu le brouillard qui règne, je ne regrette pas le choix que j’ai fait de partir avec mes lunettes de vues et non pas mes lunettes aux verres interchangeables (solaires, jaune ou blanc). Avec ce temps, j’aurais passé mon temps à les essuyer, voir j’aurais été contraint de ne garder que les verres correcteurs comme je l’avais fait lors du retour de l’Audax Lyon-Provence.
On croise les cyclos qui sont sur le retour. Avec les éclairages dans le brouillard, c’est assez désagréable, car éblouissant. Sur le plat où dans la montée du Roc Trévezel ce n’est pas trop gênant, mais ca le sera beaucoup plus dans le descente sur Brest. Parmi les lumières que nous croisons, il y a Alain. Il a crié nos noms à tout hasard à certains cyclos qu’il croisait, mais pas au bon moment car nous ne l’avons pas entendu.
Nous ne verrons pas grand-chose du Roc Trévezel entre la nuit et le brouillard. La montée est longue, mais n’est jamais très raide. Nous repérons la bifurcation pour le col du Trédudon juste avant le sommet. Il y a quatre ans, nous avions hésité, cette année, nous ferons le crochet au retour.
Au sommet, Christophe change les piles d’un de ses éclairages arrière. Nous amorçons ensuite la descente sur Brest. Comme indiqué plus haut, les éclairages des cyclos que nous croisons sont assez éblouissants et gênant avec la vitesse. Nous essayons de rester groupé, mais ce n’est pas toujours évident. Heureusement, la disposition de l’éclairage arrière de Valexnico est assez caractéristique et constitue un bon point de repaire.
Malgré cela, je le perds de vue lorsque les organisateurs nous font bifurquer. Bruno est avec moi et nous essayons d’accélérer, mais sur ces petites routes cela n’est pas très prudent. Cela m’énerve un peu de les avoir perdu de vue et je m’agace un peu bêtement et prend un petit coup au moral. Nous continuons à notre rythme sur ces routes sinueuses où les maisons sont de plus en plus nombreuses, signe que la ville de Brest approche.
Il me semble que l’arrivée sur Brest est moins vallonnée qu’il y a 4 ans, est-ce une impression ou pas ? Nous descendons pour arriver enfin sur le pont Albert Louppe. Christophe et Valexnico nous attendent à l’entrée du pont pour une petite pause photo avant de reprendre la route.
Brest est là devant nous. Là aussi le parcours a été modifié, nous ne montons plus directement dans la ville mais longeons le port et le bord de mer un long moment avant de remonter dans la ville.
Arrivé là, c’est le manège habituel : pointage, repas, remplissage des bidons, lecture des messages. J’appelle Roland & Céline pour leur indiquer que nous sommes déjà arrivé, environ 20 minutes plus tôt que l’estimation que je leur avait donné la veille. Ils sont sur la route et arriverons peu après.
Benoit nous rejoint alors que nous finissons notre petit-déjeuner. Nous le laissons pour retourner à nos vélos. C’est là que Roland & Céline nous rejoignent. Cela faisait 4 ans que je ne les ai pas vu. Bien que je sois dans ma bulle, je suis profondément content de les voir. On discute, mais le temps de pause imparti est maintenant écoulé et il nous faut reprendre la route.
Brest – Carhaix
Nous voilà maintenant sur le chemin du retour. Si moralement cela constitue une étape important, nous savons que le parcours qui nous ramène à Saint-Quentin en Yvelines n’est pas plus simple qu’à l’aller et que la fatigue va commencer à se faire sentir.
Le brouillard est toujours présent sur ce tronçon qui ondule entre Brest et Landernau. C’est dans une de ces descentes que Christophe va se faire une frayeur. Alors que nous flirtons avec les 60km/h, son vélo se met à guidonner. Avec sang-froid, il va réussir à maintenir son vélo en ligne tout en ralentissant pour s’arrêter en bas de la descente. Au départ, nous croyons que c’est une crevaison qui a provoqué le phénomène, mais il semble que ce soit simplement un effet du vent dans la sacoche de guidon.
La frayeur passée, nous voilà dans la côte de Landerneau qui se prolonge par la remontée sur le Roc Trévezel. Cette année, il y a moins de vent, peut-être est-ce aussi du à notre passage tôt dans la journée. La montée en est donc facilitée par rapport à 2007.
Au début de la descente, nous laissons Bruno filer tout droit direction Carhaix, il n’est pas intéressé par la chasse aux cols. Pendant que Valex s’arrête pour rechercher ses lunettes dans sa sacoche, Christophe et moi bifurquons pour passer au col du Trédudon, un aller-retour de 2km sur une route quasi-plate. La DDE qui travaille à l’intersection nous indique que nous faisons fausse route. Nous leur expliquons que nous allons chercher un col supplémentaire. D’autres nous imiterons certainement plus tard car quelques cyclos, notamment du club des 100 cols, nous interrogerons sur la localisation du col en nous voyant rejoindre le parcours.
On repart ensuite pour rejoindre Carhaix. L’accumulation des kilomètres commence à se faire sentir pour certains. C’est ce que nous dit un espagnol parfaitement francophone avec qui nous discutons. Nous le reverrons à plusieurs reprises grâce à son maillot rose avec un lapin blanc dessiné dessus, en raison du nom de son club « Los conejos ». Il est coutumier des longues distances et fait office de capitaine de route pour un groupe de 16 espagnols.
On arrive à Carhaix juste après Bruno, mais suffisamment pour affoler ceux qui nous suivent. Notre pointage n’est pas enregistré tout de suite et les messages pleuvent littéralement sur nos portables. J’appelle mes parents pour les (r)assurer que nous sommes bien arrivés à Carhaix.
En arrivant au pointage, j’ai aperçu Danièle, une cyclote de Chassieu, qui fait l’assistance (en voiture) de Jean-Luc. Il souffre un peu, une tendinite, mais vu les horaires de passage, il a de la marge et pourra rentrer dans les délais sans encombres si l’inflammation ne s’aggrave pas trop.
Carhaix – Loudéac
En repartant, je m’arrête pour discuter avec Danièle et Valexnico qui réinitialisait son compteur ne m’a pas vu et me rentre dedans. Heureusement, cela se produit à faible vitesse et personne ne tombe.
Sur ce tronçon, nous allons retrouver Michel que nous pensions loin devant nous. Il a trouvé un compagnon de route et nous sommes donc 6 à rouler ensemble sur ce tronçon. Les kilomètres défilent au rythme de nos discussions, jusqu’à ce que nous soyons dépassés par un groupe d’italien.
Les routes sont relativement étroites sur une bonne partie du parcours et nous nous sommes retrouvés à deux de front sur cette route étroite sous les yeux d’une voiture de l’organisation qui klaxonne frénétiquement. Nous avons donc droit à un dépassement pour le moins dangereux – sans visibilité suffisante – assorti de menaces de tous nous pénaliser pour ne pas avoir tenu notre droite.
On est un peu irrités par ces menaces qui nous semblent absurdes et injustes, surtout vu la dangerosité de la manœuvre dont nous avons été témoin. Quelques kilomètres plus loin, nous retrouvons la voiture arrêtée sur le bas-côté en train de sermonner les italiens qui nous ont dépassés. Seront-ils pénalisés, je ne le sais pas.
A partir de là, va commencer un manège qui durera 30 minutes et nous tapera sur les nerfs. Manifestement, ils ont envie de faire du zèle et semblent décider à vouloir absolument nous sanctionner. Nous nous ferons ainsi rappeler à l’ordre – on nous demande de tenir notre droite – alors que nous roulons parfaitement en file indienne à moins de 50 cm de l’accotement.
Devant nous, nous voyons des cyclos qui roulent au milieu de la route, mais cela échappe manifestement à la vigilance de cette voiture qui s’obstine à nous suivre et dont les regards sont rivés sur le moindre potentiel écart que nous pourrions faire. La voiture s’arrête parfois, nous laisse passer, puis réapparait dans mon rétroviseur quelques minutes après. Un manège plus qu’agaçant.
A un moment, les voyant arrêtés sur le bord de la route, il s’en est fallu de peu pour que je ne m’arrête et leur demande, en des termes peu courtois, de nous foutre la paix. Plus de 40 heures après notre départ, la fatigue commence à être présente et la patience atteint ses limites beaucoup plus vite qu’en temps normal.
Que les organisateurs veillent à la sécurité des cyclistes me semble une louable intention et une bonne chose, mais de là à les mettre en danger comme ce fut le cas lors du dépassement évoqué plus haut, ou à s’acharner bêtement comme ici, c’est de la connerie. Je suis persuadé que nous sommes tombés là sur deux chefaillons ayant l’intention de profiter du maigre pouvoir qui leur a été concédé, le reste de l’organisation ayant été irréprochable sur ce point. Cette engeance existe dans chaque organisation quelle qu’elle soit, mais il n’empêche que leur dérisoire acharnement fut ici particulièrement irritant. Pour en avoir discuté avec d’autres participants, nous ne sommes pas les seules victimes du zèle imbécile de ces individus.
A un stop, Christophe a une explication franche avec Valexnico à propos de cette voiture qui nous suit. Le véhicule, témoin de la scène, nous fichera désormais la paix. Est-ce lié ? C’est possible car Valexnico, provocateur, squattait la dernière position du groupe de s’amusait en faisant différents étirements ou adoptant des positions acrobatiques sur son vélo.
Nous arrivons maintenant à Saint-Nicolas-du-Pélem où nous refaisons nos bidons. Le soleil est toujours bien présent et nous faisons bien attention à nous hydrater régulièrement.
Nous avons croisé les derniers cyclos dans les environs de ce ravitaillement, inutile de dire que pour eux, c’est cuit pour rentrer dans les délais. Le contrôle de Carhaix, sens aller, a fermé au moment où nous partions pour Loudéac. D’ailleurs, les cyclos que nous croisons n’ont pas l’air très fringant sur leur monture. A se demander comment ils ont pu passer les brevets qualificatifs dans leur pays (la plupart sont asiatiques).
L’arrivée sur Loudéac est assez cabossée, la route est identique entre l’aller et le retour, mais nous avalons les bosses sans trop de difficultés.
Afin de ne pas rompre avec la coutume inaugurée il y a 4 ans, quelques gouttes de bruine saluent notre arrivée sur Loudéac.
Loudéac – Tinténiac
Après un repas consacré à nos discussions sur les agacements de l’étape que nous venons de terminer, nous voilà prêt à repartir. Christophe a eu le temps de manger une galette saucisse pendant notre heure de pause. De mon côté, j’ai discuté avec le cyclo espagnol qui nous avait accompagnés en revenant sur Carhaix, il faut dire que son maillot rose vif le rend très visible dans la foule.
Le soleil commence à décliner et la nuit n’est pas bien loin quand nous nous présentons au contrôle secret. Pas si secret que ça d’ailleurs car il était déjà là 4 ans plus tôt. On plaisante d’ailleurs à ce sujet avec les bénévoles présents sur place.
Pascal est arrivé en même temps que nous et nous demande comment nous envisageons la suite. Nous l’informons que nous avons décidé de passer la nuit à Tinténiac pour repartir le lendemain matin à 4h15.
Parmi les compagnons de route de ce tronçon, nous aurons un capitaine de route de Paris-Brest-Paris Audax. Il en a bouclé un en entier, et la moitié d’un autre 3 semaines avant celui-ci. Il dit que cela lui est profitable, je veux bien le croire, mais encore faut-il avoir « la caisse » suffisante pour enchainer comme il le fait. Il y aussi un collègue du club de cents cols avec qui nous allons rouler un bon moment et que nous retrouverons le lendemain entre Villaines-la-Juhel et Mortagne-au-Perche.
Il connait bien le parcours et nous indique qu’une fois passé le relais télé, la suite sera plutôt roulante jusque Tinténiac.
Le trajet se termine à la nuit dans un bon état de forme et avec un moral toujours excellent. De bon augure pour la suite, d’autant que nous avons encore une bonne nuit de sommeil qui nous attend. Au moment où nous parquons nos vélos, on aperçoit Jeannot qui s’apprête à repartir.
Nous avons droit à un dortoir grand luxe : une chambre de 4. Valexnico a demandé à faire chambre à part au prétexte que Christophe ronfle trop fort. Bruno apportera du crédit à cette hypothèse en réveillant Christophe sous ce prétexte fallacieux. De mon côté, n’ayant rien entendu durant ces deux nuits, je reste persuadé que c’est une légende urbaine.
La fatigue commence à se faire sentir chez tout le monde. Alors que nous sommes déjà levé un bénévole arrive dans la chambre et ne comprend pas que nous soyons debout alors qu’il était censé nous réveiller. En réalité, il a confondu deux chambres. Christophe m’avait demandé de l’accompagner à son vélo la veille au soir car il ne se rappelait plus où nous les avions posés.
Alors que nous nous apprêtons à repartir, une question m’assaille : comment avais-je trouvé l’énergie et l’envie de repartir sous la pluie il y a 4 ans. Je mesure mieux ce que nous avons réalisé en 2007.
Tinténiac – Fougères
Après le petit-déjeuner (sans thé, je trouve bizarre que cela n’ait pas été prévu à ce ravitaillement, je ne pense pas être le seul buveur de thé sur les 5000 participants), nous voilà prêt à repartir.
Comme nous nous en doutions après avoir établi à une moyenne très élevée sur ce tronçon à l’aller, nous allons établir un record dans l’autre sens pour le retour. Si l’aller était majoritairement en faux-plat descendant, le retour est plutôt montant. Rien de très raide, mais juste un terrain usant.
D’après Christophe, c’est le seul tronçon où nous roulons moins vite que sur notre plan de route prévisionnel. Nous discutons avec nos compagnons de route du moment. Il se trouve qu’un couple de Caladois est avec nous.
Comme le tronçon est court, nous ne profitons à aucun moment de la lumière du jour. Cela a certainement contribué à nous ralentir car jusqu’à présent nous avions toujours bénéficié du soleil soit en début, soit en fin de tronçon depuis notre passage à Villaines-la-Juhel il y a 48 heures.
Comme à l’aller, le parcours a du être tracé par l’office du tourisme et les commerçants locaux tellement nous avons l’impression de tourner en rond avant d’arriver au contrôle.
Il y a un peu d’affluence à notre arrivée, et nous n’arrivons pas à nous mettre tous les 4 à la même table. Bruno et moi nous retrouvons à celle d’un motard qui contrôle les éclairages. Avant de repartir, il nous rappelle que nous devons porter nos gilets réfléchissants et garder nos éclairages allumés tant que la luminosité n’est pas suffisante. L’organisation leur a demandé d’être intraitable sur ce point.
Fougères – Villaines-la-Juhel
Dès la sortie de Fougères, une belle bosse nous attend. Christophe a anticipé, mais pas nous qui avons gardé nos vestes par peur de la fraicheur matinale. Du coup, nous faisons une pause pour nous déshabiller et soulager nos vessies au sommet.
Le départ est assez accidenté et cela commence à tirer dans les jambes. Notamment celles de Bruno. Aux environs de la moitié de l’étape, nous le voyons régulièrement 50m derrière nous, derrière nous, et surtout ne pas revenir. Nous levons alors le pied pour qu’il nous rejoigne. Une fois regroupé, nous discutons de la marche à suivre. Soit on lève le pied et on fini tous ensemble, soit, et c’est ce que Bruno nous demande de faire, nous continuons notre route à trois, les délais étant suffisamment larges pour lui permettre de rentrer tranquillement sans trop forcer sur son mollet qui le fait souffrir.
Nous décidons donc continuer à notre rythme et de le laisser finir au sien comme il nous l’a demandé. Le tronçon est globalement assez accidenté et à force de boire, je dois marquer des pauses pour vidanger tout ce que je bois. Il faut dire que j’ai fini le brevet de 600km avec un point de tendinite très certainement lié à une mauvaise hydratation, je suis donc attentif à boire régulièrement.
A chaque fois, je laisse Valexnico et Christophe filer devant et les rejoint petit à petit en prenant bien soin de ne pas forcer pour revenir sur eux trop rapidement, tout à l’économie en somme.
Nous arrivons maintenant à Villaines-la-Juhel. Cela commence à sentir bon, un gros 200km et nous serons arrivé, ce n’est pas encore terminé, mais nous savons qu’avec la marge que nous avons, il faudrait une catastrophe pour nous empêcher de terminer en moins de 90h.
Bruno arrive un gros quart d’heure après nous et va profiter de pouvoir prendre son temps (plus de délai d’une heure par contrôle à respecter) comme nous le faisons depuis le départ et en profiter pour se faire masser. Ayant profité des soins du médecin et d’un masseur ici même il y a 4 ans, je ne peux que l’encourager dans cette idée. C’est certainement là que j’ai été le mieux massé il y a 4 ans et le toubib avait été de très bon conseil et m’avait rassuré sur mon état physique et ma capacité à aller au bout. Je repense d’ailleurs à ce qu’il m’avait dit, à savoir que nos temps d’il y a 4 ans, étaient supérieurs d’une bonne dizaine d’heure à ce que valions en temps normal. A la lumière de nos temps de passage, je m’aperçois qu’il n’était pas très loin de la vérité.
Alors que je remplis mes bidons, je retrouve le collègue espagnol de Zaragoza. Lui aussi est en bonne forme. Son groupe profite d’être largement dans les délais pour s’accorder une longue pause. Je croise à nouveau Danièle qui s’inquiète pour Jean-Luc. En plus des points de tendinites, il a des crampes et mal aux dents. Je lui demande de transmettre nos encouragements et la rassure sur la marge dont il dispose sur les délais.
Alors que nous nous apprêtons à repartir, nous entendons au micro que la vague va arriver dans quelques heures. Nous sommes donc devant le gros de la troupe, cela nous surprend un peu. Nous avons certes bien roulé, plus rattrapé de cyclos que nous n’avons été doublé, mais nous n’avons pas l’impression de passer dans des temps extraordinaires non plus, d’autant que nous prenons notre temps (1h) sur les contrôles et avons dormi plus que prévu.
Villaines-la-Juhel – Mortagne-au-Perche
Nous repartons à trois, mais nous allons rapidement former un petit groupe, avec notamment le cyclo du club des 100 cols avec qui nous avions roulé quelques kilomètres hier. La discussion s’engage à nouveau et les kilomètres défilent.
C’est un tronçon assez vallonné, notamment dans sa seconde partie, à l’approche de Mamers. Le groupe va d’ailleurs se disloquer passé cette ville. Nous voilà à nouveau à trois.
Les jambes ne sont plus là, j’ai mal à un mollet, moi aussi. C’est la tête qui prend le relais pour appuyer sur les pédales, pendant ce temps je serre les dents pour essayer de rester dans les roues. Je perds quelques mètres au sommet des bosses, je recolle dans les descentes. M’accroche sur le peu de plat qu’il y ait. Mortagne me paraît bien loin et bien haut, mais la suite étant beaucoup plus roulante, je ne veux pas perdre les roues de Christophe et Valexnico.
Valexnico semble avoir mal aux jambes également et nous décidons de nous faire masser au médical à Mortagne.
La dernière bosse, Mortagne est en haut. Enfin ! Le petit raidard pour accéder aux contrôles m’achève, mais je peux aller me faire masser et me ravitailler. J’ai déjà repéré la tente qui vendait des sandwiches aux merguez, pas très diététique peut-être, mais j’en ai envie pour changer des pâtes / riz / patates des autres ravitaillements et des barres / gels que nous ingurgitons sur le vélo.
Le massage me fait beaucoup de bien, aussi bien sur le plan physique que psychologique. On discute pas mal avec le masseur et cela permet de changer les idées, même si on parle de Paris-Brest… On apprend que la voiture de France Télévision aperçue dans la montée sur Mortagne-au-Perche est là pour un reportage qui devrait être diffusé en décembre d’après ce qu’on pu apprendre les bénévoles du contrôle.
Le massage terminé, Valexnico et moi nous dirigeons vers la tente qui vend les sandwiches dont nous avons rêvé. Trop tard, nous voyons le dernier nous filer sous les yeux. On se rabat sur ceux au pâté qui sont vendus dans la salle. Christophe est là en discussion avec Jean-Louis, un des membres du forum des longues distances. Nous nous étions rencontré il y a 2 ans au BRA. Je lui demande – bêtement – ce qu’il fait là, il me répond qu’il a abandonné à l’aller. Voilà ce que c’est que de ne pas aller sur le forum régulièrement. Jean-Louis, excuse-moi !
L’heure qui nous est impartie va bientôt se terminer, j’avale à la hâte la fin de mon sandwich et enfourche ma monture. Plus que 150km, si tout va bien, nous devrions terminer aujourd’hui, dans tous les cas, nous ne devrions plus avoir à nous arrêter dormir avant l’arrivée, et ça fait du bien de se dire ça !
Mortagne-au-Perche – Dreux
La route ondule un peu jusque Longny-au-Perche, mais je ressens pleinement les bienfaits du massage, et les sandwiches m’ont apporté un peu d’énergie supplémentaire.
Le parcours devient ensuite plus roulant, mais aussi plus déplaisant. On se retrouve sur des routes plus passantes, relativement rectilignes et fréquentés par des automobilistes peu respectueux des cyclos. Bref, c’est un tronçon ennuyeux à tout point de vue.
Sur ces routes soporifiques, je sens arriver le coup de barre et anticipe donc en prenant un gel à la caféine. Je ne dois pas être le seul car parmi les quelques cyclos que nous rejoignons, bon nombre ne tiennent plus très bien leur droite. Lorsque nous les dépassions, nous en avons même averti plusieurs dont le positionnement au milieu de la route était particulièrement dangereux.
Christophe n’apprécie pas trop ce tronçon non plus. Il commence à avoir mal à un genou et demande à Valexnico qui assure l’essentiel des relais de ne pas rouler à plus de 25km/h, alors que nous roulions auparavant plus près de 30km/h.
Après de très longs et ennuyeux kilomètres, nous voyons enfin Dreux. Comme souvent, nous tournons pas mal avant de rejoindre la salle qui sert au contrôle. Je me rappelle très bien d’un raidard peu avant l’arrivée, le parcours n’ayant pas été modifié, nous y aurons droit.
On pause les vélos et alors que nous nous dirigeons vers le pointage, on vient nous chercher et on nous fait rentrer individuellement au contrôle. Au moment où chaque participant pénètre dans la salle, une salve d’applaudissement l’accueille chaleureusement. C’est particulièrement émouvant.
A peine ai-je pointé que mon téléphone sonne. C’est Jean-Jacques. On le soupçonne d’être à l’origine de la surcharge ponctuelle du site à force de rafraichir les pages pour ne pas rater nos pointages.
C’est le dernier ravitaillement avant l’arrivée. Je n’ai pas très faim, j’ai la tête un peu ailleurs, certainement quelques part du côté de Saint-Quentin en Yvelines… Je discute rapidement avec un anglais avec qui nous étions au départ. Quand je lui demande comment il va, il me répond : « Better than expected » (traduction : « Mieux que je ne pensais » pour les non-anglophones).
En discutant entre nous, nous avons convenu de faire vite avant de repartir. Nous savons que nous allons terminer cette nuit, mais nous voulons profiter au maximum de la lumière du jour. On aurait pu repartir quelques minutes plus tôt si je n’avais pas eu de problèmes pour changer les piles d’un de mes éclairages arrière.
Dreux – Saint-Quentin
Le départ n’est pas très agréable, nous sommes en zone urbaine et certains automobilistes roulent comme des demeurés, même sur des axes qui sont pourtant secondaires. Heureusement, le parcours est bien tracé et nous nous retrouvons rapidement sur des routes plus tranquilles.
On a avec nous un cyclo qui lui est parti en 85h et accuse un peu le coup, comme en témoigne les écarts qu’il fait parfois sur la route. Il se plaint un peu de la météo qu’il a eu à subir, mais cela s’équilibre avec 2007 où les 85h avaient été globalement épargnés par la météo.
Je ne sais pas si le parcours a été modifié par rapport à 2007, mais je ne reconnais rien. Par contre, malgré la nuit qui tombe, je reconnais certaines des routes empruntées à l’aller.
Nous nous rapprochons doucement de la vallée de Chevreuse, notre collègue nous a laissé filé, mais dans la suite quasiment ininterrompue d’agglomérations, nous allons rejoindre d’autres cyclos et nous faire rejoindre pour constituer un groupe d’une petite dizaine de cyclos.
Le parcours se fait plus vallonné et les nombreuses intersections, ronds-points et ralentisseurs nous obligent à relancer très fréquemment. Les effets du massage ne se font plus sentir et les jambes redeviennent lourdes, et chaque à-coup pèse dans les jambes.
La nuit est maintenant bien présente et il faut être vigilant au milieu de tous ces aménagements urbains. D’autant plus vigilants que nous sommes maintenant une petite dizaine à rouler ensemble. Christophe et Valexnico nous emmènent à vive allure vers Saint-Quentin. Pour s’assurer que je suis toujours là, ils hèlent régulièrement mon nom, il faut dire que je suis peut à l’aise au milieu des autres cyclos sur cette partie technique. L’arrivée est très proche, et sentant la fatigue, je préfère être prudent, je ne suis donc que rarement aux avant-postes du groupe. Deux suédois qui sont avec nous ont compris le manège et facilitent mon replacement dans les premières lignes quand on crie mon nom. Merci à eux.
Le final
Voilà, on y est, l’agglomération de Saint-Quentin en Yvelines. La fin de l’aventure est proche. Si tout au long du parcours, il y a eu des spectateurs et du respect pour les cyclos, de jeunes cons donneront une bien piètre – très peu représentative – dernière image des spectateurs en nous jetant des cailloux avant de lâchement détaler comme des lapins (voir des iguanes de Garenne ). La pierre ira rebondir dans les rayons d’une des roues de Valexnico, mais ne blessera personne et n’occasionnera aucune casse matériel. Nous ne serons pas les seules victimes de cette bande d’abrutis, que la police ne retrouvera pas.
Pour la première fois depuis le départ, je sens un peu de lassitude et manque d’envie de pédaler. Cela ne dure pas car l’arrivée est maintenant proche. Nous commençons à croiser des cyclos qui rejoignent leur voiture ou leur hébergement. Christophe et son GPS nous guident dans la ville, il faut dire que les flèches sont bien visibles, mais leur pointe n’est pas toujours facile à distinguer dans la nuit ce qui peut occasionner quelques hésitations à l’approche des carrefours. Une petite hésitation à l’un des derniers carrefours, mais des cyclos qui reviennent de l’arrivée nous indiquent la bonne direction.
Une dernière ligne droite, je pense aux copains qui étaient là il y a 4 ans : Chrystel, Yann, Rodolphe et Jean-Jacques. Je pense aussi à mes parents qui étaient venus nous voir à l’arrivée. L’émotion n’est pas la même qu’il y a 4 ans, mais elle n’en est pas moins forte.
Ça y est, la ligne d’arrivée est franchie. Merci Bruno, Christophe et Valexnico pour ces magnifiques moments sur le vélo. Merci aussi aux copains et à la famille pour les nombreux messages d’encouragements, plus particulièrement Roland et Céline qui sont venus nous saluer à Brest. Merci également aux organisateurs et aux bénévoles pour leur travail et leur bonne humeur.
Alors que nous entrons dans le gymnase pour pointer et rendre notre carnet de route en vue du contrôle final (afin de s’assurer que nous avons bien pointé partout et pas raté de contrôle secret), nous voyons Alain qui s’apprêtait à sortir nous accueillir avec des gâteaux et de boissons pour nous. Merci à lui pour cette attention, alors qu’il était déjà tard et qu’il n’avait pas eu l’occasion de beaucoup dormir pendant son parcours.
On rend nos carnets de route, les suédois qui ont terminé avec nous nous remercient pour les avoir emmenés et guidés dans le final. Je n’ai pas eu la présence d’esprit de proposer un échange de maillot, une tradition parait-il pour les participants étrangers. En même temps, l’ATSCAF est déjà connu en Scandinavie, n’est-ce pas Baraque ?
Voilà, c’est fini, on essaye d’atterrir doucement et de revenir à la réalité. Les messages pleuvent, dont un que je n’attendais pas : mon patron qui m’adresse ses félicitations. J’apprendrai après par un ami qu’il l’avait contacté afin d’avoir mon n° de dossard pour suivre ma progression.
On se restaure et on se réhydrate en attendant Bruno. Je n’aurais pas la force de l’attendre et m’endormirai avant, malgré l’inconfort des gradins du gymnase. Je croise Jean-Pierre, de Craponne. On discute un peu, lui est là depuis presque 24h, impressionnant !
Le lendemain matin, Bruno91, Valexnico et Christophe repartent chez Bruno91. Nous décollerons peu après pour rejoindre Auxerre. Le dessert du jour sera un Paris-Brest, bien évidemment, le meilleur d’Auxerre, mes parents ayant testé les différentes boulangeries d’Auxerre pour le sélectionner.